jeu 26 décembre 2024

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15 mai à Zagtouli : Le Naaba Kaongo met à contribution un sanctuaire pour sa cité

La date du 15 mai est désormais journée nationale des coutumes et traditions (JCT) au Burkina Faso. Une journée qui est déclarée, chômée et payée par la Transition burkinabè, dirigée par le capitaine Ibrahim Traoré, chef de l’État. À l’occasion, le Naaba Kaongo, chef de Zagtouli célèbre cette journée, une première fois au Burkina Faso par des rites. Dans la matinée de ce mercredi 15 mai 2024, il nous a accordé un entretien portant sur les activités qu’il organise en cette journée qui est la bienvenue, selon lui. Dans son entretien, il informe avoir mis a contribution un sanctuaire qui jadis était utilisé pour demander la clémence des ancêtres dans les périodes douloureuses telles que des accidents, des crises ou des maladies.

Infos culture du Faso (ICF): Le Burkina Faso a institué le 15 mai la journée nationale des coutumes et traditions (JCT). À votre niveau, comment vous appréciez cette journée ?

Le Naaba Kaongo, chef de Zagtouli (NK): Je tenais à remercier le gouvernement pour cette initiative parce que Zagtouli était déjà dans la dynamique à travers le festival des Journées des coutumes et traditions de Zagtouli. C’est avec satisfaction que nous accueillons cette journée dédiée à la tradition. À notre niveau, nous célébrons cette journée avec joie au niveau du palais de Zagtouli.

ICF: Vous avez parlé de rites, qu’est qui a été proprement fait ? Quelle sont vos intentions ?

NK : On a mis à contribution un sanctuaire qu’on sollicitait le temps des périodes douloureuses. C’est un sanctuaire qui nous permettait, si on avait des maladies, des accidents et les mauvaises choses dans la société, on partait demandé la clémence des ancêtres et les génies de la terre. Et c’est ce site qu’on a utilisé aujourd’hui pour faire les rites. C’est un coq noir et un bouc noir qu’on utilisait pour balayer tout ce qui est noir dans la société et dans la vie de la population de Zagtouli. Après ça, on a utilisé un bœuf pour qu’il y ait une bonne pluie dans la campagne hivernale.

ICF : Notre pays traverse une crise sécuritaire. Est-ce que vous avez fait des sacrifices à ce niveau pour un retour de la paix ?

NK : C’est notre deuxième fois de faire ces genres d’activités parce qu’on avait fait déjà notre intention pour le retour de la paix qui s’était passée à l’intérieur du palais. C’est des activités que nous faisons tous les temps, on n’a pas besoin de mots d’ordre du gouvernement pour faire des rites pour la paix. Il faut relever que chaque village devrait faire des rites sur son territoire. Ici, je suis le chef de Zagtouli, c’est à moi de m’adresser aux ancêtres et aux génies de mon territoire. Nous ne pouvons pas nous adresser aux ancêtres d’un autre terroir. Mais, on peut formuler des vœux à l’échelle nationale. Il serait important que chaque village fasse des sacrifices sur son territoire et c’est l’ensemble de ses vœux qui permettront de ramener la paix au Burkina Faso.

ICF: Le sacrifice a été fait sur le lieu appelé «sougri», qu’est ce que cela veut dire ?

NK: «Sougri» qui veut pardon est un site sur lequel nos ancêtres faisaient des sacrifices pour le bonheur de la population. Les gens se focalisent sur le côté humain uniquement alors que des esprits vivent avec nous. Et il faut composer avec tous ces gens-là. Sur le site de Sougri, il y a un lion, un chat noir, un serpent, un bélier plein d’animaux qui sont invisibles et qui habitent là-bas. C’est à tous ces esprits qu’on demande des bénédictions et des clémences à nos ancêtres quand il y a trop d’accidents sur la route, trop de maladies et de crises. Et, au bout de deux ou trois ans, on a plus d’accident sur la route. C’est un site dédié pour des événements malheureux.

Concernant la demande de la pluie, là on cherche un bouc et un coq qu’on n’a pas besoin de savoir son propriétaire pour faire ce sacrifice à l’intérieur du palais. Généralement, la pluie tombe soit la même journée, soit dans les jours proches. C’est pour dire que malgré le jeune âge qu’on a, malgré la modernité, on est toujours dans la durée de la tradition. Je pense que dans la tradition, on est toujours dans la droiture, on pense toujours collectivement. Cela demande souvent les moyens, surtout le sacrifice des bœufs, mais souvent sur la charge du chef. Il est obligé de le faire, car c’est à lui de donner le bon exemple.

C’est l’occasion également de dire aux populations de chaque village d’accompagner leur chef coutumier, car, souvent, on a la volonté de faire des rites mais les moyens sont limités. Il faut dire également qu’à l’échelle de la chefferie, on fait des rites avant, pendant et après la saison pluvieuse, mais aussi le grand « Nabaska ».

ICF : Qui peut faire vos rites sur le sanctuaire ?

NK : Celui qui s’occupe des rites du sanctuaire, c’est « Poussoum Naaba ». C’est lui également qui s’occupe de la fête coutumière des ancêtres et les rires sur les tombes et le chef suit. S’il s’agit d’installer un étranger, il y a le « Tengsoba » qui veille à cela. Ils sont tous là pour officier. Les premiers animaux, c’est le chef qui les envoie, après les Naaba de chaque domaine. J’ai également demandé à chaque quartier de Zagtouli, une vingtaine de villages d’amener leur poulet pour les tuer sur le site. Au-delà de ça, j’ai ouvert ça à tous ceux qui sont basés à Zagtouli et veulent des enfants, du bonheur, du marché peuvent également faire des vœux sur le site. Après cela, c’est ouvert à toute personne qui veut faire des sacrifices.

ICF : Quelle invite faites-vous auprès de la population pour qu’elle fasse de cette journée, une fête des coutumes et traditions ?

NK: Au-delà des rites, il y a également nos tenues vestimentaires, de l’art culinaire, de la danse, mais aussi le respect de nos valeurs cardinales notamment, le respect de nos aînés. Cette journée, nous permet de mettre au point tout ça. C’est-à-dire que nous allons faire l’objet des bonnes pratiques de nos traditions pour en faire un bon usage. Je donne un exemple. Dans la tradition Mossi, un enfant ne doit pas obstruer la rentrée d’une maison parce que naturellement, il y a des esprits qui rentrent et qui sortent. Et, s’il le fait, il risque d’être victime de quelque chose, très souvent, il tombe sans que personne ne le pousse. Cela veut dire que c’est un esprit qui voulait sortir et il était sur son passage.

Deuxième chose, on dit à un enfant Mossi que si le soleil est à l’ombre d’un zenith, il ne faut jamais pisser dans l’ombre d’un arbre, car il se pourrait que tu vas pisser sur des esprits qui se reposaient sur cette arbre. Naturellement, ils peuvent lui créer des problèmes.

Modou Traoré (collaborateur)

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