Afin de nous imprégner des réalités du secteur artistique en général et le conte en particulier nous avons reçu Minata Diéné une conteuse professionnelle burkinabè, dans nos locaux. Il est ressorti de cet entretien que le conte est beaucoup aimé ici au Burkina Faso même si sa gestion laisse à désirer. Lisez plutôt.
Infos culture du Faso (ICF) : Veuillez- vous présenter à nos lecteurs s’il vous plaît.
Minata Diéné (MD) : Moi c’est Minata Diéné, je suis comédienne, actrice de cinéma et de théâtre, formatrice, metteur en scène, conteuse professionnelle depuis 2008. Je suis de nationalité burkinabè.
ICF : C’est quoi le Conte ?
MD : Le conte est un récit, une histoires que l’on raconte pour éduquer ou pour émerveiller son public. C’est une école, une mémoire, C’est beaucoup de choses à la fois. Le conte est universel en ce sens que même en Europe, er partout dans le monde, les gens disent des contes, ils ont des livres de conte, ils connaissent le conte.
ICF: Comment êtes vous venue au conte ?
MD: Alors professionnellement, je suis venue au conte à travers le théâtre de la fraternité. J’ai commencé par le théâtre avec le professeur Jean Pierre Guingané, (paix à son âme). Dès la première année, il avait une équipe qui devrait partir à Bordeaux, pour dire des contes dans des écoles, des centres pour handicapés mentaux, et des centres pour personnes âgées. J’ai eu la chance de faire partie de cette équipe constituée de quatre personnes, dont deux filles et de deux garçons. Alors, j’ai tout de suite réveillé les vieux contes que ma mère me disait quand l’étais enfant. Je les ai réactivés et il les a aimés. Et c’est à partir de là.
ICF: Des spectacles à votre actifs ?
MD : Oui, j’ai « polygamico » que j’ai monté avec une amie du nom de Tassala Tata BAMOUNI. C’est un duo de conte théâtralisé. J’ai aussi plusieurs autres contes que je dits en sol, et le dernier en en date est intitulé « les contes de Mama » que j’ai présenté le 22 mai dernier au Goethe Institut. Avec le conte, je parcours beaucoup d’endroits. Partout où on m’invite pour des spectacles, tant au Burkina qu’à l’extérieur du pays, j’y vais. J’ai donné une soirée de conte à Marseille en 2019, deux spectacles au palais de la culture de treichville à Abidjan en Côte d’Ivoire lors d’un festival appelé le FITHA en 2018.
ICF: D’après vous, comment se porte le conte ici au pays ?
MD : Le conte se porte super bien en ce sens que nous avons des conteurs professionnels dans les quatre coins du Burkina non seulement, mais aussi et surtout, nous assistons à des séries de formations en conte ces dernières années, organisées par des structures de la place. Ce qui fait germer de jeunes conteurs. Une personne qui a le courage de venir au conte, c’est qu’elle aime le conte, elle aime entendre les histoires. Moi, j’aime beaucoup entendre des histoires. Donc je ne me prive pas de lire un livre d’histoire ou d’écouter des histoires racontées; donc d’aller suivre des spectacles de conte.
ICF : Le conte nourrit-il son homme ici au Burkina Faso ?
MD : Le conte peut nourrir son homme si c’est bien payé. Il faut se dire que l’art de façon générale est mal rémunérée au Burkina. Il y en a qui t’invite pour te dire vient m’accompagner à mon festival. Généralement, ce sont des amis; tu les accompagnes à zéro franc. Mais du point de vue relations humaines, c’est de « l’argent ». Et quand on fait quelque chose qu’on aime, cela nous nourrit déjà. Donc le conte nourrit bien son homme.
ICF: d’où vous vient l’inspiration pour raconter des histoires ?
MD: Je tire mon inspiration de ma mère, de la vie, de la nature, de tout ce qu’il y’a autour de moi. J’aime beaucoup chanter, j’aime beaucoup danser aussi. Donc, quand je dis un conte, j’aime quand il y’a des chants, et des moments de danse là dedans. Cela m’inspire aussi.
ICF: La jeunesse peut-elle vivre du conte de nos jours ?
MS: Bien-sûr, la jeunesse peut bel et bien vivre du conte. Il suffit à la jeunesse de prendre ce métier au sérieux, d’y mettre du sien. Si le mécanicien qui se trouve au bord de la route et qui répare les engins à 50 francs, 200 francs vit de son métier de mécanicien, pourquoi pas le conteur. Il suffit de mieux réorganiser le secteur du conte, le penser autrement, le faire bouger plus pour que chacun y gagne son pain.
ICF: Qu’avez-vous à répondre à ceux qui pensent que le conte ne peut pas faire vivre une personne au Burkina Faso ?
MD: C’est possible, c’est leur appréhension de la chose, c’est leur point de vue. Moi je le sens pas trop parce que je fais plusieurs choses en même temps pour ne pas chômer, pour ne pas sentir le poids d’un seul métier sur moi. Quand il n’y a rien à faire, quand j’ai pas de spectacle de conte, je me mets à écrire. Et quand je n’écris pas, je me mets au théâtre ou à la mise en scène, ou autres choses.
ICF: Qu’avez-vous à répondre aux personnes qui pensent que les jeunes sont pressés dans ce métier ?
MD: C’est normal! Les jeunes viennent avec un diplôme dans le métier, ils vont se former pendant trois ans, voir plus dans des écoles de spectacles. Tu ne peux pas prendre ton bac, aller te former pendant trois ans pour sortir avec un diplôme et puis vouloir chômer pendant une ou deux années. Les formations sont payantes. Donc on ne peut pas continuer à penser le métier comme on le pensait il y’a 20 ans voir plus en arrière.
ICF: Un appel à la jeunesse qui veut emboîter vos pas de conteuse ?
MD : C’est de s’y lancer, de ne pas hésiter. Car il y’a de la place pour tout le monde, homme comme femme.
ICF: Quelles sont les grandes lignes de vos prochains projets ?
MD: J’ai des spectacles en vue. Des mise en scènes de prévue, même si pour l’instant, il n’y a pas de date précise. Pour finir, je dit merci à Infos Culture du Faso pour l’interview, pour la considération et à très bientôt pour des soirées de conte.
Propos recueillis par Abdoul Gani Barry (stagiaire)