Kayaba Anaïs Irma Kéré , une jeune réalisatrice en pleine ascension dans le cinéma burkinabè qui porte l’espoir d’une carrière radieuse. Dans un entretien qu’elle nous a accordée, Anaïs parle de son premier court-métrage » L’audition », sélectionné pour le FESPACO 2025 et revient aussi sur son parcours, ses expériences en tant que scénariste et réalisatrice, ainsi que les défis rencontrés dans la concrétisation de son projet cinématographique.

Info Culture du Faso (ICF) : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Anaïs KERE : Je suis Kayaba Anaïs Irma KERE, journaliste de formation, critique de cinéma et membre du bureau de l’Association des Critiques de Cinéma du Burkina Faso (ASCRIC-B). Je suis également scénariste et je débute dans la réalisation.
ICF : Parlez-nous de votre carrière.
Anaïs KERE : J’ai participé à des formations qui ont permis d’accroître mes connaissances en écriture de scénario et réalisation. Il s’agit entre autre :
Des formations en écriture, réalisation et mise en scène depuis 2017 à l’Institut Imagine du réalisateur burkinabè Gaston Kaboré.
- L’atelier de formation d’écriture et réécriture, 7 jours pour un film (2019, lors du cinquantenaire du FESPACO)
- Thriller et talents qui est un atelier d’écriture dans le genre Thriller ( meurtres et enquête policière). suite à cela, j’ai été retenu pour participer au développement de la série canal plus original » De plus en plus loin » avec d’autres auteurs.
- La Maison Junior : atelier d’écriture de séries d’animation et de fiction (4 mois au Togo et 6 mois en distanciel au Burkina Faso).
- Taafé Vision , cette association apolitique, laïque et à but non lucratif, qui milite pour la représentativité significative des femmes dans l’industrie cinématographique et audiovisuelle à travers des ateliers de formation en écriture et réécriture de scénario et réalisation. Je fais partie de la promotion 2024 avec le projet « Artivisme pour un monde plus juste ».
- Les Elles du Cinéma : formation en réalisation avec Apolline Traoré, en collaboration avec Réalisatrices Équitables. À l’issue de cette formation, j’ai eu l’opportunité de réaliser mon premier court-métrage intitulé L’audition, qui aborde le thème de l’autisme.
- Formation en voix off à la voice Academy de Ouagadougou avec Roland BATOUA, afin d’ajouter une autre corde à mon arc pour plus tard opérer dans le domaine du doublage des films.
- L’édition passée du FESPACO en 2023, je fais partie de la deuxième promotion des jeunes talents de la Yennenga Academy.
- J’ai également participé à des tournages, notamment celui de Dani Kouyaté avec le film, « Katanga, la danse des scorpions » qui est en compétition officielle à la 29e édition du FESPACO dans la catégorie long-métrage fiction, où j’ai été assistante stagiaire à la mise en scène.

ICF : Que ressentez-vous en voyant votre film sélectionné en compétition officielle au FESPACO 2025 ?
Anaïs KERE : C’est une immense joie, d’autant plus que c’est ma première réalisation. Cela me motive à travailler davantage, car cela confirme que j’ai fait le bon choix en embrassant ce métier.
ICF : Pouvez-vous nous parler de votre film ? Quelle est son essence, son message ?
Anaïs KERE : Le film raconte l’histoire de Déborah, une jeune autiste passionnée de chant qui rêve de devenir une grande chanteuse. Pour atteindre son objectif, elle doit surmonter sa peur d’affronter un monde extérieur qui juge sa différence. Décidée à relever les défis liés à son handicap et soutenue par son grand frère Yohan, Déborah se rend à une audition musicale.
J’aborde le thème de l’autisme en mettant en valeur la musique et le chant. Je souhaite que l’on voit mon personnage au-delà de son handicap, car elle est avant tout une jeune fille avec des rêves et des passions, comme n’importe qui. Sa différence ne la définit pas. Pour ajouter, je dirais que ce qui a motivé le choix de ce thème est mon neveu Maël qui est autiste. Avoir dans ma vie une personne autiste m’a ouvert les yeux sur l’essentiel. J’ai su me contenter de ce que je suis parce que vivre avec un handicap n’est pas toujours aisé. En effet, l’on est fréquemment victime de jugements et préjugés de la part de ceux qui sont dans l’ignorance.

ICF : Quelles ont été les principales difficultés rencontrées lors de la réalisation de ce projet ? Chaque film a son lot de défis. Quels ont été les vôtres et comment les avez-vous surmontés ?
Anaïs KERE : Plutôt que des difficultés, j’ai rencontré des défis. L’autisme étant un sujet peu abordé, je pensais pouvoir m’inspirer uniquement de mon neveu pour écrire l’histoire, mais je me suis rendu compte que chaque autiste réagit différemment. J’ai donc consulté monsieur Boukari PAMTAABA, responsable de l’Association Burkinabè d’Accompagnement Psychologique et d’Aide à l’Enfance (ABAPE). Ses conseils, ainsi que les films, reportages, émissions et documentaires visionnés, m’ont aidé à écrire une représentation que je pense fidèle de l’autisme.
Le scénario a nécessité un travail d’écriture et de réécriture sur trois ans. Lors de la formation « Les Elles du Cinéma », j’ai bénéficié de séances de mentorat avec la réalisatrice Justine Martin de l’organisme canadien à but non lucratif « Réalisatrices Équitables ». Grâce à elle et aux différents processus de recherche cités plus haut, j’ai pu aboutir à la version finale qui a été tournée.
En plus, lors de la préparation de tournage, j’ai effectué des séances d’immersion au sein du centre ABAPE avec mes comédiens principaux, Sergine SOUROUWEMA et Aaron Ouedraogo qui interprètent respectivement Déborah et Yohan. Ceci dans le but donc qu’il aient des éléments concrets sur les différents comportements que peuvent avoir les autistes. Je ressors ainsi grandi au regard de toutes ces expériences vécues.
ICF : Face à la compétition, comment percevez-vous vos chances ? Vous sentez-vous confiante vu le niveau élevé cette année ?
Anaïs KERE : Être en compétition signifie que j’ai autant de chances de gagner que les autres réalisateurs. Cependant, pour moi, l’essentiel est que le film soit vu. Comme on le dit souvent, « les films sont faits pour être vus ». Les festivals comme le FESPACO offrent une visibilité précieuse aux courts métrages, permettant à un large public de les découvrir.

ICF : Nous sommes au terme de notre entretien, quel est votre mot de fin ?
Anaïs KERE : Je tiens à remercier l’équipe dynamique qui m’a accompagnée sur ce projet (la production, l’équipe technique, les comédiens). J’invite également les Burkinabè à venir en salle soutenir les réalisateurs locaux. J’espère humblement que mon film contribuera à une meilleure connaissance de l’autisme sous nos latitudes.
Bio-filmographie de la réalisatrice Kayaba Anaïs Irma KERE 👇👇👇
Interview réalisée par Parfait Fabrice SAWADOGO