ven 29 mars 2024

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CINÉMA: Zoom sur la carrière de Kiswendsida Parfait Kaboré, réalisateur burkinabè

De plus en plus de jeunes cinéastes burkinabè s’intéressent au cinéma documentaire. Et ça, Kiswendsida Parfait Kaboré l’avait bien compris. Passé par plusieurs instituts de formation de cinéma, il est aujourd’hui l’un des réalisateurs burkinabè les plus talentueux en matière de film documentaire. Il est par ailleurs l’auteur des films « Place à la révolution » et « Après ta revolte, ton vote ». Lors de la dernière édition de Koudougou Doc, il nous a accordé un entretien dans lequel il revient sur sa carrière.

Infos Culture du Faso (ICF): Vous êtes réalisateur, dites-nous quel a été l’élément déclencheur ?
Kiswendsida Parfait Kaboré (KPK): J’ai fait mon parcours scolaire à Ouagadougou. Et à cette époque, j’avais comme rêve de devenir médecin afin de sauver les gens; mais également plus tard, j’ai également voulu être prêtre. Et lorsque je suis arrivé au lycée Nelson Mandela de Ouagadougou pour mes études secondaires, j’ai eu la chance d’intégrer un ciné club, celui de Gaston Kaboré que nous y avons cofondé dans ce lycée. Mais il faut dire que j’avais cette envie de travailler avec l’image même si je ne savais pas exactement en ce moment s’il fallait faire du cinéma ou de la photographie. J’avais juste une passion pour l’image en ce sens que j’ai eu des oncles photographes. Je me rappelle que j’ai été pendant un moment le photographe du lycée Nelson.

ICF: Avez-vous suivi des formations particulières ? Si oui, parlez-nous en ?
KPK: Après la création du ciné-club, j’ai pu avoir des formations de base. A la suite de l’obtention de mon baccalauréat en 2006, j’ai voulu m’inscrire à l’Institut supérieur de l’image et du son/Studio-Ecole (ISIS/SE), sauf que c’était assez coûteux pour mes parents. J’ai dû donc m’inscrire en faculté de Droits à l’Université de Ouagadougou où je suis sorti diplômé d’une Maîtrise en 2011. C’est rien qu’après cela que j’ai pu aller faire un master en réalisation documentaire à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, spécialisée dans le documentaire. C’est comme ça que mon histoire avec le cinéma commence. Mais à la base, je voulais faire de la fiction.

ICF: Faites-nous un bref récapitulatif de votre filmographie ?
KPK: Aujourd’hui dans le cinéma documentaire, j’ai deux longs-métrages documentaires, trois courts-métrages et pleins d’autres projets à venir. Quand on était encore au ciné-club, je m’étais formé en montage. Et comme ça, j’ai commencé à monter quelques films d’amis. Il faut dire qu’à force de le faire, ça me traversait souvent l’esprit de le rendre autrement, mais je ne pouvais pas parce-qu’il y avait derrière ces projets, des réalisateurs; par conséquent, je ne pouvais pas imposer un autre regard.
Cela m’a donné envie de m’essayer à la réalisation. Étant donc à l’Université Gaston Berger, j’ai fait un court-métrage titré « Demain l’Afrique ». Ce film, quand je le faisais, c’était pour essayer une nouvelle manière de filmer afin de pouvoir réaliser mon long-métrage que j’étais entrain d’écrire. J’ai continué à écrire ce projet tout en réalisant un autre court-métrage « A double tranchant » à l’Université d’été de la FEMIS où j’ai fait un stage de deux mois. Après cela, j’ai fait un autre, co-produit par Pilimpiku Production de Mamounata Nikiema intitulé « Circulation ya yélé ».

ICF: Parlez-nous de vos deux long-métrages ?
KPK: Il faut dire que c’est la somme de toutes ces expériences dans le court-métrage qui m’ont permis de réaliser mon long-métrage « Place à la révolution ». En gros pour ce film, je partais sous la base de faire un portrait sur deux artistes (Smockey et Sams’K le Djah) bien avant l’insurrection. Et quand j’ai commencé à les filmer, interviewer, ils ont créé le mouvement « Balai citoyen ». Ils ont ensuite essayé de mobiliser les gens pour l’insurrection. Et donc je me suis dit que le portrait que j’avais envie de faire n’est plus d’actualité, et que c’est mieux de les suivre dans ce qu’ils font réellement. C’est ce qui a finalement abouti au long-métrage « Place à la révolution ». Après la révolution, ces personnes là ont continué leur lutte, et je me suis également dit qu’il ne fallait pas aussi m’arrêter là. C’est comme ça que j’ai réalisé le second long-métrage « Après ta revolte, ton vote » sorti en 2019 et qui a fait sa première mondiale à Amsterdam (Pays-Bas).

ICF: Au vu des thématiques abordées dans ces œuvres, peut-on dire que vous avez fait de l’activisme ?
KPK: De l’activisme, je n’en sais pas trop. Mais si je repars à la base, où je rêvais d’être médecin et aussi prêtre, je me suis rendu compte que le cinéma me permet beaucoup plus de toucher des âmes, apporter ma vision des choses et de laisser les gens s’inspirer de ce que je fais, de prendre ce qui les intéresse. C’est pour ça que je ne dirais pas de l’activisme mais plutôt un regard que je propose bien que ça soit politique et cela je l’assume. Tout ce que je ferai aura un aspect politique. Je vais même jusqu’à dire souvent qu’à chaque fois que je ferai un film, il y a notamment Sankara qui y apparaîtra, et la deuxième personne qui même si ce sont ces textes qui vont apparaître est le regretté Amidou Valéan. Ce sont des personnes qui m’ont inspirés et j’ai envie de les faire revivre à chaque fois dans mes œuvres.

ICF: Veuillez-nous parler de vos projets.
KPK: Je travaille actuellement sur beaucoup de projets, notamment des projets de fictions, et évidemment des documentaires. Et là j’ai un projet qui doit suivre le long-métrage « Après ta revolte, ton vote » parce que je pars sur la base d’une trilogie. Le titre provisoire même si ce n’est pas probable que je le garde, est « La lutte continue ». Mais pour l’instant, je l’ai mis en stand-by parce que j’ai envie de mûrir encore l’écriture, le dispositif. Aussi, j’ai un autre projet de film sur ma mère dénommé « De la chenille au papillon ». Il s’agit là encore de questionner mon dispositif, ma manière de filmer et là j’ai trouvé que ma mère est le personnage qu’il faut. J’ai envie d’interroger la révolution, la politique, l’engagement de la femme dans la société en passant bien-sûr par ma mère parce-que souvent on oublie que la femme, c’est celle-là qui donne la vie aux révolutionnaires, qui les nourrit, etc.

ICF: Vous êtes spécialisé dans le documentaire, et là vous nourrissez l’idée de faire aussi de la fiction. Pourquoi un tel basculement ?
KPK: Je ne bascule pas du tout. Comme je vous l’avais dit, ma toute première formation était en fiction. Si je suis venu au documentaire, heureusement parce qu’il m’a beaucoup apporté, mais qu’à cela ne tienne, je ne lâche pas la fiction parce-que pour moi, fiction ou documentaire, il y a presque pas de limites. Il y a des sujets que je fais en documentaire et certains que je pense qu’ils seraient mieux en fiction. Il arrive même que je pense à faire certains en animation. Juste dire que je ne me catégorise pas en disant que je suis documentariste ou réalisateur de fictions ou d’animations. Pour moi, c’est l’idée qui m’amène à choisir le type de cinéma que je dois utiliser. Pour l’instant, je ne sais pas comment fait-on l’animation, mais dès le moment où j’auraus l’idée, je vais trouver des personnes qui peuvent illustrer, faire des dessins et tout mais ça serait moi le réalisateur; encore une fois je me donne pas de limites.

ICF: Quel est votre coup de cœur parmi toutes vos réalisations ?
KPK: C’est vrai que j’entends des genres dire que c’est difficile de faire le choix. Bien que cela paraisse vrai, mais le premier film en tant que professionnel est important pour moi. Il faut dire j’ai quand même une préférence pour « Place à la révolution »; pas parce-qu’il a une importance que les autres mais il revêt une histoire qui m’est venue à travers ma grand-mère. En effet, elle avait un vieux post-radio qu’elle m’a refilé parce qu’elle en avait reçu un nouveau de la part de mon oncle. C’était en 2005. Et la première fois que j’allume cette radio, c’était la voix de Sam’s K le Djah que j’ai entendue. Et cette voix m’a tellement parlé que je me suis dit qu’il y’a quelque chose à faire. J’ai tout de suite senti que je devais faire quelque chose avec lui. C’est non seulement une histoire qui part de ma grand-mère mais qui a été aussi réalisée sans grand budget. J’ai eu la chance d’avoir un producteur burkinabè qui a mis du matériel à ma disposition. A la base, je suis monteur, donc je le monte de moi-même. Le film, on l’a fini carrément en fin 2014 après la chute du Président Blaise Compaoré et il est sorti en 2017. Cela a pris en gros trois ans avant que le film ne sorte en ce sens que j’ai beaucoup galéré jusqu’à ce que je rencontre une productrice qui a accepté d’entrer en coproduction. Beaucoup de personnes qui m’ont vu quand je filmais dès le début des marches se demandaient où j’en étais avec le projet. Certains-mêmes allaient jusqu’à penser que j’ai vendu mes images avec des chaînes de télé et cela m’avait énormément affecté. Et le 27 Avril 2017, quand j’ai procédé à l’avant-première à la salle de ciné Burkina, le retour des uns et des autres m’ont comblé.

ICF: Quel est votre mot de fin ?
KPK: Je dirais tout simplement merci. Merci pour cette considération, celle de m’offrir l’opportunité de parler de ma personne ainsi que de ma jeune carrière.

Interview réalisée par Boukari OUÉDRAOGO

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